La tentation de devenir écrivain

Le caractère souvent intime de l’écriture fait que les trois quarts des écrivants refusent de se considérer comme des «écrivains amateur ». (* Les activités d’écriture en amateur désigne le fait de tenir un journal intime, d’écrire des poèmes, des nouvelles ou des romans dans le cadre du temps de loisir, c’est-à-dire en-dehors de toute contrainte professionnelle, scolaire ou administrative.)

Certains parmi ceux qui écrivent des poèmes ou un journal intime récusent logiquement le terme d’écrivain plus que celui d’amateur, d’autres sont sensibles à la connotation péjorative du mot «amateur», beaucoup enfin paraissent ne pas juger leur production d’une qualité suffisante ou «ne pas être assez doué» pour mériter l’appellation d’«écrivain amateur».

Cette appréciation, qui rejoint celle qu’ils portent sur leurs progrès, témoigne du fait que beaucoup écrivent simplement pour conserver des traces des moments forts, voire douloureux, de leur existence ou pour chercher à mettre de l’ordre dans leurs pensées, sans avoir le sentiment de se livrer à une activité littéraire, fût-elle amateur.

Les auteurs de textes littéraires qui correspondent le plus à la définition commune de l’écrivain et dont l’activité est aussi la plus visible socialement revendiquent pour la majorité d’entre eux (53%) le titre d’écrivain amateur, contre seulement 20% de ceux qui tiennent un journal intime.

Pourtant, les écrivants qui déclarent avoir pensé un jour devenir écrivain ou vivre de leur plume ne sont pas des exceptions : 12% ont caressé cette ambition dans le passé avant de l’abandonner, 17% le pensent toujours sans trop d’espoir et 5% y croient encore véritablement.

Ces réponses renvoient à la particularité des activités d’écriture et du champ littéraire en général : devenir romancier ou poète n’implique pas aussi systématiquement que dans d’autres domaines artistiques de devenir un «professionnel » car nombreux sont les écrivains qui ne vivent pas exclusivement de la diffusion de leurs textes et qui ont parallèlement d’autres sources de revenus.

Le désir de devenir écrivain varie fortement selon les genres, entre les littéraires dont plus de la moitié (56%) ont pensé un jour devenir écrivain (17% d’entre eux continuant vraiment à croire en la reconnaissance de leur talent) et ceux qui tiennent un journal intime qui ne sont que 23% à avoir nourri les mêmes espérances.

Extrait de :
Développement culturel
Ministère de la Culture, Direction de l'administration générale, Bulletin du Département des études et de la prospective, 2, rue Jean-Lantier, 75001 Paris - Tél. 40 15 73 00 - Télécopie 40 15 79 99 - No 111 - mai 1996